Souvenir cathare en terre champenoise

 

Le Mont Aimé, terre cathare en plaine champenoise…

Ce circuit de 130 km environ, au départ de Reims, vous mènera dans le sud du département de la Marne, jusqu'à la butte du Mont Aimé, lieu symbolique et chargé d"histoire.  Pour s’y rendre, il faut suivre la côte des blancs en traversant des vignobles prestigieux, le retour se faisant par un crochet en Brie champenoise avant d’atteindre Montmort et de revenir par la vallée du Sourdon.

Au départ de Reims, on rejoint Epernay pour piquer au sud et, suivant la D10, arriver à Guis, point de départ de la célèbre "Côte des Blancs“, réputée pour la qualité de ses crus.
 

CUIS
Joliment étagé sur les pentes, il faut remonter en haut de Cuis pour atteindre l’église Saint Nicaise. Edifiée au milieu du XII°, elle présente la particularité rare, pour une église rurale, d’un chœur à 2 niveaux de fenêtres d’une certaine hardiesse, peut-être inspiré des prémices gothiques de Saint Rémi. Dans le cimetière, il faut remarquer une intéressante croix Renaissance (1542) dont la base en pierre sculptée représente le Christ et des anges porteurs des outils de la Passion. Quittant Cuis, on se dirige vers Cramant qui n’offre pas d’intérêt particulier, le panorama alentour étant son plus bel atout. C’est Avize qui se présente ensuite.
 

AVIZE
Saint Nicolas, son église du XII°, au centre du village, fut autrefois l’abbatiale d’un monastère bénédictin. Au nord, un portail roman est orné d’archivolte ainsi que de colonnes à fûts brisés. En partie haute le regard est accroché par de belles gargouilles, plus tardives. D’Avize à Oger, il n’y a qu’un pas.

OGER
Il faut à nouveau grimper par un lacis de ruelles étroites pour parvenir à l’église, elle aussi bâtie au XII° en style gothique primitif. Il faut pouvoir pénétrer à l’intérieur pour apprécier les stalles du XVIII°. Au-delà d’Oger se profile Le Mesnil sur Oger.

LE MESNIL SUR OGER
C’est à nouveau sur les hauteurs du village qu’il faut aller chercher l’église Saint Nicolas, édifice des plus intéressants. Si la nef est du XII°, le chœur est érigé au XIII°, cependant que la Renaissance nous livre, en 1540, le beau portail sud. L’accès se fait par des grilles qui proviendraient de Saint Germain de Châlons et mène au portail finement orné de bandeaux, colonnes et figures humaines. Plus modeste, le portail ouest, roman, est surligné d’un cordon de billettes. Au sortir du Mesnil, c’est la D9 qu’il faut suivre pour parvenir à Vertus

VERTUS
Ce gros bourg est une étape intéressante à plus d’un titre. Son histoire est tumultueuse ; réunie à la Couronne de France en 1285, Vertus est saccagée en 1380 et 1420 au cours de la guerre de 100 ans. Ce qui en subsistait est détruit en 1443 par les milices qui en chassent les brigands qui avaient trouvé refuge dans les ruines. Les guerres de religion ramènent la mort et la désolation en 1568, en 1814, les coalisés pilleront la ville, enfin en 1940, Vertus aura encore à subir d’importantes destructions… Malgré ces vicissitudes, Vertus fait mieux que survivre et offre aux visiteurs  l’aspect avenant d’une bourgade prospère, parée de jolis édifices. L’église Saint Martin, du XII°, étonne par son implantation qui la fait partiellement reposer dur une source de la Berle, le puits Saint Martin. A l’intérieur, on s’intéressera au chœur voûté dés la construction d’origine, avec de belles chapelles latérales où reposent des sculptures en pierre des XV°et XVI°siècles. Sous le chœur et les chapelles latérales se développe en sous-sol, une vaste crypte édifiée dans le premier tiers du XII°. En flânant dans Verus, on peut franchir la porte Baudet (XIII° et XIV°), souvenir bien préservé et restauré des fortifications. Enfin, dans Vertus, l’eau est omniprésente et semble jaillir de toutes parts.

http://www.villevertus.fr


De Vertus, on poursuit, toujours vers le sud pour, après avoir franchi Bergères-les-Vertus, rejoindre la butte mythique du Mont Aimé. En voyant cette butte fièrement dressée en plaine champenoise, il faut imaginer la formidable forteresse qui la couronnait au Moyen-âge.

LE MONT AIME
Culminant à 240m, le Mont Aimé (Mont Ymer) se développe sur 150 hectares environ. Habité dés le néolithique, ce haut-lieu devint vite un point stratégique, occupé successivement par un oppidum gaulois puis par un camp romain. La tradition veut que les grands carolingiens se rassemblèrent là pour proclamer roi des francs, Louis II le Bègue successeur de Charles le Chauve. Il sera couronné à Compiègne. Au début du XIII°, c’est Blanche de Navarre, veuve de Thibaut III de Champagne, chef de la quatrième croisade, et mère de Thibaut IV qui décide de l’érection d’une puissante forteresse au sommet du mont. Sa tour donjon était particulièrement remarquable, haute de plus de 50 m et se développant sur 6 étages.
En ces mêmes lieux, s’était implantée, sous la conduite d’un certain Leutard, de Vertus, une communauté d’hérétiques, qui inscrivaient leurs pensées et leurs croyances dans le prolongement de Manès (le manichéisme) et des bogomiles. Ce furent 183 personnes qui se virent convaincus d’hérésie assimilée à celle des albigeois et des cathares, et périrent par le feu le vendredi 13 mai 1259. Quand on fait le lien avec l’origine bogomile de ce mouvement en Europe de l’est (Bulgarie, Bosnie), il est stupéfiant de considérer l’ampleur de l’hommage que rendit aux victimes de l’autodafé, le Tsar Alexandre Ier qui, après sa victoire, réunit son armée (300 000 hommes, 85 000 chevaux) au pied du Mont Aimé. Cet immense pèlerinage fut voulu par ce Tsar mystique qui connaissait le passé du lieu et savait le symbole cathare qu’il représentait. Il fut ainsi écrit que “… le Mont Aimé fut le berceau du catharisme d’occident comme Montségur en fut le tombeau…“.
Le château sera démantelé en 1428, suite aux conflits entre bourguignons et armagnacs et servira de carrière pour les villages environnants.  Il n’en reste aujourd’hui que de rares éléments mais la vue que l’on a au sommet de la butte permet d’imaginer le sentiment de puissance qui régna en un tel lieu.
Cap à l’ouest, maintenant en suivant la D933 qui nous mène à Etoges.

ETOGES

Il y a là un fort beau château, aujourd’hui hôtel restaurant d’excellente renommée. Ce fut autrefois une des plus importantes places fortes de la Brie champenoise. Entourés de douves, les bâtiments actuels, érigés par les comtes d’Anglure au XVII°, prennent appui sur des substrats beaucoup plus anciens ; on en devine la structure par les tours d’angles. Le château d’Etoges fut apprécié par le roi Louis XIV qui y séjourna, de retour du Luxembourg en septembre 1687. Dans le village, beau pigeonnier en brique sur la place, sans omettre l’église Saint Sulpice et Saint Antoine, du XII° avec portail Renaissance du XVI°. Depuis Etoges, on remonte sur le plateau, plein nord, par la D18 que l’on emprunte jusqu’à rencontrer la D38, au cœur d’une belle et dense forêt piquetée de nombreux étangs ; ici encore, l’eau abonde.
Il faut tourner à gauche, à la croisée des chemins jusqu’à découvrir, en contrebas sur lagauche, dans un frais vallon, le vaste domaine de La Charmoye.

 

LA CHARMOYE
On comprend mieux le lieu d’implantation quand l’on sait que les bâtiments conventuels actuels furent construits au XVII° sur le site de l’ancienne abbaye cistercienne. Celle-ci resta en activité jusqu’à la révolution.
Fondée en 1167 par des moines de l’abbaye de Vauclair, ceux-ci choisirent le fond de vallon arrosé par le ru Moret. Connaissant un développement rapide, l’abbaye de La Charmoye reçut la bulle de confirmation du pape Alexandre III dés 1178. Vers 1225, l’abbaye eurent maille à partir  avec les chanoines de Notre Dame de Vertus, soutenus par Blanche de Navarre et il y eut à déplorer jusqu’en 1240, de nombreuses escarmouches entre les deux communautés. S’il ne reste rien de visible de l’abbaye originelle, il faut savoir que, selon le plan dressé en 1790, les dimensions de l’église abbatiale étaient de 74m de long sur 54 m de large et 17,50m de hauteur ! La vente des biens à la révolution en provoqua la destruction.

http://lamop.univ-paris1.fr/baudin/monasteres/citeaux/charmoye/charmoye.htm

Il faut maintenant rejoindre Montmort.

MONTMORT
La petite cité, accrochée sur le rebord du plateau, peut s’enorgueillir de posséder un château pour le moins spectaculaire. Déjà cité en 1296, signalé en 1389 et 1492 comme ruiné par faits de guerre, le château, tel que nous pouvons le contempler aujourd’hui, fut érigé autour su donjon original à la fin du XVI° siècle (1577). Erigé en marquisat par Louis XV en 1767, le château n’a pas eu trop à souffrir de la révolution. Il est célébré par Victor Hugo qui évoque, en 1842, “…le ravissant tohu-bohu de tourelles, de girouettes, de pignons, de lucarnes et de cheminées…“.
Suivons maintenant la vallée du Surmelin par la D18 en direction du nord-ouest. Sur la gauche de la route, on aperçoit, en contre-haut, l’église de Corribert, du XIII°. On parvient ainsi à Mareuil-en-Brie, village étagé sur les pentes du plateau. Dans le bas du village, château du XIX°, visible seulement de l’extérieur.
On pense maintenant à revenir vers Reims et, de Mareuil-en-Brie, on prend l’orientation nord-est par la D11 jusqu’à Saint Martin d’Ablois, célèbre, dans le passé pour son Parc Paysager du Sourdon, créé au XIX° siècle. Tourner à droite en direction de Brugny-Vaudancourt par la D36 puis traverser le village ; en bout, la rue du château permet, entre les futaies, d’entrapercevoir le château de Brugny. Construit à la fin du XV° pour Louis et Oger de Saint Blaise en remplacement d’une précédente construction détruite en 1422, le château formait un quadrilatère, à  l’origine couronné de tours. La tour antérieure gauche, carrée, est de l’époque de la reconstruction. Les autres tours, rondes, restaurées au XIX°, pourraient provenir de la première construction. Récupérant la D951 qui rentre sur Epernay, il reste à rendre visite à la charmante église Saint Martin de Chavot, reconstruite en 1579,  Saint Martin, qui domine la vallée.
Il reste à retourner vers Reims après avoir parcouru au long de 130 km, terroirs et paysages très variés qui recèlent de véritables trésors architecturaux.